samedi 25 novembre 2017

Aux femmes de Hamdi Al-Gazzar

Photo de l'éditeur
     Lorsque les éditions Belleville m'ont contactée pour lire leur dernière publication, je me suis laissée tentée pour deux raisons. La première : il s'agit d'une petite maison d'édition indépendante qui s'enorgueillit de présenter des fictions "hors des sentiers battus", tout en donnant "une fenêtre sur le monde". L'aspect multiculturel de leur démarche ne pouvait que me séduire... et comme j'ai un faible pour l’Égypte dont je connais, hélas, bien peu la littérature, je me suis laissée embarquée de l'autre côté de la Méditerranée. Tant mieux ! car ce livre de Hamdi Al-Gazzar, élu meilleur livre de l'année en 2014 en Égypte, est une petite perle au goût d'Orient qui mérite de se laisser savourer !
   Le récit commence dans les années 60. Le jeune Sayed, âgé de quatre ans, fréquente l'école d'Ibn Touloun, près de la mosquée du quartier de Khalifa. Il vit entre son père et sa mère, mais aussi entouré d'une cohorte de femmes qui vont accompagner son existence, elles seront celles qui vont le faire grandir. De la première, Rouheyya, sa tante, à la dernière, Salwa. Chaque chapitre porte le nom d'une d'entre elles et nous conte l'apprentissage de Sayed que nous quitterons à ses trente ans. Ainsi, à seize ans, le jeune homme est fasciné par Zohra, la fille de quinze dans qui n'est pas du quartier mais qui est belle à couper le souffle, même habillée d'un simple sac en tissu ! Sayed à ce moment là a le cœur qui chavire vite et qui "commence à s'intéresser aux femmes".
   Ces dernières s'avèrent être les piliers qui structurent le roman comme elles vont structurer la vie du jeune héros. Et autour de lui, c'est tout un quartier qui prend vie sous les voix et les mouvements de ces femmes que l'on découvre dans leur quotidien. Le lecteur se retrouve emporté dans la vie quotidienne égyptienne. Il découvre un monde parfois brutal (dans les rapports père-fils par exemple) mais aussi rempli d'amour et de sensualité. L'écriture, à la fois simple et imagée, arrive à nous transporter au Caire et l'on plonge dans la chaleur dorée où la voix du muezzin rythme le temps journalier.
"C'est l'après-midi, par un chaud soleil, le jardin Al-Khalidin est magnifique avec ses arbres imposants, ses plantes, ses fleurs, le gazouillis des oiseaux, sa sérénité ; il est presque désert. Dans l'allée de gravier, sous un immense camphrier, un seul banc - et j'y suis assis avec Rim. Nous nous regardons et discutons sans retenus, en toute confiance."
   J'ai pris grand plaisir à cette immersion dans le monde cairote. Mais surtout, j'ai apprécié de découvrir un pays de culture arabe autrement qu'au travers de témoignages liés aux attentats ou aux problèmes religieux. Autant dire qu'au moment où le deuil recouvre le pays suite à un nouvel attentat (le plus meurtrier de l'histoire récente du pays dit Le Monde), ce livre présente un aspect du monde arabe qu'il est urgent de découvrir et de faire découvrir !
Merci donc aux éditions Belleville pour cet envoi qui prend sa place dans le challenge des ouvrages de la rentrée littéraire 2017. Il faut souligner également le très beau travail de composition de la couverture qui se marie parfaitement bien au sous-titre de l'ouvrage : "Ode sensuelle au cœur du Caire populaire". J'ai également eu un beau marque page assorti (voir photo ICI).
Je ne peux qu'être désolée de publier ce billet alors que le pays évoqué pleure ses morts ... C'est une bien maigre contribution mais je dédie ce billet à la mémoire des victimes.

20 commentaires:

  1. Les 'petites' maisons font souvent du beau travail (certains 'grands' éditeurs usent de papiers moches ou de reliures ne tenant pas)

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    1. @Keisha : c'est vrai. Il y a d'ailleurs certains poches (Garnier-Flammarion pour ne pas les citer) qui ne tiennent absolument pas la distance. Mon "Ecole des femmes" de Molière peut en témoigner... C'est bien dommage car ils font du bon travail au niveau des dossiers ! Enfin, heureusement, il y a l'exception "Actes Sud" ;-)

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  2. une jolie découverte manifestement, je note de nom des éditeurs

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    1. @Dominique : tout à fait ! Si le livre t'intéresse, tu peux le commander sur le site des éditeurs. Bon dimanche à toi.

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  3. Une petite maison d'édition à suivre de près on dirait. J'aime beaucoup les romans qui sortent des sentiers battus et s'ils sont en plus axés littérature du monde, ça devrait me parler. Je vais y regarder de plus près.

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    1. @A_girl : oui oui... d'ailleurs, en consultant leur site, on découvre d'autres perles... Il est bien fait, si tu as le temps d'aller y jeter un coup d’œil, ne te prives pas ;-)
      En plus de tout ça, je n'ai pas évoqué le glossaire à la fin du livre qui permettait d'avoir le sens de certains mots peu usités en France, ou des renvois vers des éléments numériques au fil des pages (mais je ne les ai pas utilisés, étant loin de l'internet lors de cette lecture...).

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  4. C'est bien de découvrir les nouveaux auteurs. Pour ma part, j'en suis restée aux romans d'Albert Cossery, en particulier à "La maison de la mort certaine" qui m'avait marquée. A lire !

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    1. @Claudialucia : j'aime bien Cossery aussi... que je n'ai pas lu depuis longtemps. C'est bien, comme tu le dis justement, de découvrir de nouveaux auteurs, surtout des contemporains.

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  5. Une lecture originale, merci pour la découverte.

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    1. @Anne : oui, n'hésite pas à te lancer, quand tu voudras changer de tes lectures québecoises ou du grand Nord ;-)

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  6. Une lecture qui mettra la triste actualité à distance, sans doute.

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    1. @Alex : oui, un peu de fraîcheur dans ce monde de brutes épaisses, cela fait du bien...

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  7. Une belle lecture visiblement et un bel objet ; je vais aller voir de près ce que fait cet éditeur.

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    1. @Aifelle : tu peux trouver le livre sur le site que j'ai mis en lien. Je pense qu'il pourrait te plaire d'ailleurs ! Bonne soirée :-)

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  8. Soleil et ombre - je note ce titre, Margotte.

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  9. Je pense à "L'immeuble Yacoubian" de cairote El Aswany, à la différence que celui-ci ne place pas les femmes au centre du récit.
    [Je ne vois pas le marque-pages au lien indiqué. Je les collectionne, c'est une façon de ramener à bon marché des souvenirs de voyages, de visites, ...].

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    1. @Christw : je n'ai pas lu "L'Immeuble Yacoubian". Pour le marque page, si, il est sur la table, à côté du livre sur la photo. Il faut descendre un peu dans le billet... J'ai aussi de très nombreux marque-pages que j'aime bien retrouver parfois dans les livres. Ils rappellent des librairies, ou de bons moments dans les festivals, du livre bien sûr ;-) Bonne soirée !

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  10. Je ne connais pas mais je retiens, merci de nous faire découvrir cette maison d'édition. Bonne soirée.

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    1. @Emma : c'est un éditeur que je vais suivre... Bonne année à toi :-)

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