En général, mes lectures de JC Oates marchent
par deux. Fidèle à la tradition, j’ai donc acheté deux livres de l’écrivaine
lors de ma dernière sortie en librairie. J’ai déjà présenté le conte gothique,
le livre que voici est un recueil de nouvelles (en attendant que je lise enfin Bellefleur…). J’avoue avoir un peu
hésité avant de l’acheter car je trouve que les nouvelles ne sont pas forcément
au niveau des romans, comme si la « romancière » avait besoin de
temps pour développer tout son savoir faire. Mais enfin, elle a déjà prouvé
qu’elle peut accomplir des miracles sur les formats courts avec Folles nuits. Depuis que j’ai lu ce dernier,
je ne me refuse rien de cette artiste ! Et en ce qui concerne le recueil
dont il est question aujourd’hui, j’ai bien fait car je n’ai pas
été déçue du tout, au contraire, j’ai même été agréablement surprise car
certaines nouvelles sont vraiment excellentes.
Les dix récits qui composent le
recueil sont tous parus entre 2005 et 2008 dans des revues. Regroupés sous le
titre d’Étouffements, ils se tissent
tous sur ce thème qui porte les personnages du simple dégoût sans objet à la
mort violente. Ma nouvelle préférée est
la troisième, « Le premier mari ». Alors que les Chase préparent
leur premier voyage en Italie pour fêter leurs dix ans de mariage, Leonard, en
cherchant son passeport, tombe sur un paquet de photos entourées d’un vieil
élastique. Sur ces vieux Polaroïds, un jeune couple : sa femme
« étonnamment jeune » et un homme qu’il identifie rapidement comme le
premier mari. Ces quelques clichés vont rapidement devenir une obsession et
entraîner un bien sombre enchaînement d’événements imprévus....
Deux nouvelles présentent le même type de personnage, récurrent chez Oates : des jeunes filles un peu paumées qui étouffent dans leur milieu, chacune en limite de dérapage. On louvoie avec elles, au bord du précipice.
Deux nouvelles présentent le même type de personnage, récurrent chez Oates : des jeunes filles un peu paumées qui étouffent dans leur milieu, chacune en limite de dérapage. On louvoie avec elles, au bord du précipice.
Dans « Strip Poker »,
Annislee :
« Grande, mince et gauche,
j’ai presque quatorze ans, les attaches fines, des yeux noirs enfoncés et une
mince bouche ourlée qui m’attire des ennuis, à cause de ce que je dis ou
marmonne tout bas ; mes cheveux blond cendré, attachés en queue de cheval,
tombent comme une queue de rat mouillée sur mes vertèbres saillantes ;
sans cette queue-de-cheval, on aurait pu me prendre pour un garçon, et
j’espérais bien rester toujours comme ça, rien de plus dégoûtant qu’une femme
adulte en maillot de bain, une femme grasse comme maman et ses amies, que les
hommes, les hommes adultes, regardaient pourtant comme s’ils les trouvaient
glamour et sexy. »
Dans « Nulle part »,
Miriam :
« L’air d’une fille larguée
par son petit copain et qui tâche de ne pas pleurer. En plus elle est mineure.
En plus elle n’a jamais fait l’amour. En plus elle a eu des nausées, des
haut-le-cœur dans l’un des box puants des toilettes, mais rien n’est venu. Un
truc qu’il lui avait donné : Tu
as besoin de te détendre chérie. »
La dernière nouvelle, glaçante,
« Veine cave », raconte l’histoire du retour d’un ancien combattant.
Enfin, elles sont toutes d’une cruauté maupassantienne, imprégnée par la
violence des rapports sociaux et l’impact d’une crise économique qui laisse des
trous perdus en ruines, perclus de types défoncés à la méth (voir Breaking Bad).
Joyce Carol Oates, c’est l’anti-Hollywood. Elle
sait mieux que personne faire entendre toutes les voix de l’Amérique, celles
des beaux quartiers, mais aussi celles des pauvres filles mal mariées dans un
bled paumé comme dans « La chute ». Mon admiration est toujours aussi
intense et j’attends avec impatience le Nobel de littérature pour Mme Oates…
Je n'ai pas lu ces nouvelles mais je les notes. J'avais lu celles du musée du docteur Moss. J'avais bien aimé et effectivement, tu as raison, il y a une cruauté maupassantienne dans ses analyses des rapports humains ! Je note !
RépondreSupprimer@Maggie : comme je sais que tu aimes aussi JC Oates, je pense que ce recueil a vraiment tout pour te plaire. J'ai l'impression que maintenant, elle excelle même dans les nouvelles (celles-ci sont récentes). Il n'y a pas à dire, son talent se bonifie encore ! Bon we à toi :-)
Supprimerhélas, le glaçant et le cruel, ça me poursuit trop dans des tas de cauchemars...
RépondreSupprimer@Adrienne : oui, désolée Adrienne, je sais bien que tu n'aimes pas ça... Bon we à toi :-)
SupprimerJe ne suis toujours pas tentée par le lecture de J.O.C. ! (trop sombre et cruel)
RépondreSupprimer@Aifelle : je comprends... même si je suis toujours aussi fan ;-) Bon we Aifelle.
SupprimerTant de chroniqueuses (moins les messieurs je crois, mais il y en a si peu dans la blogosphère livre) qui lisent JCO, et moi qui n'ait toujours rien tenté d'elle. Des nouvelles ? Formats courts ? Je ne passe plus, je note.
RépondreSupprimer@Christw : si vous aimez les formats courts, vous pouvez commencer par "Folles nuits", c'est un vrai régal !
SupprimerEt oui, c'est vrai que vous êtes peu nombreux, les hommes, dans la blogosphère livre... On retrouve cela, hélas, chez les professeurs de lettres...
Je n'ai fait qu'un essai avec cette auteure et j'avoue ne pas avoir trop aimé, je dois la relire visiblement , car vous êtes nombreuses à en dire le plus grand bien
RépondreSupprimer@Luocine : je crois que les avis sur elle sont assez tranchés. Mais il est vrai que son œuvre est très disparate même si on retrouve de grandes tendances quand on la connaît un peu. Je conseille de commencer par les nouvelles ou ses courts romans...
SupprimerTu les lis par deux !!!!! Moi, à chaque fois que j'en ai finis un me faut au moins trois harlequins pour m'en remettre !!!! N'empêche que j'adore, j'y reviens quand même . J'ai noté "Premier amour" chez toi, je garde ces nouvelles au chaud.
RépondreSupprimer@Athalie : oui, par deux, cela tourne un peu à la fixation entre JCO et moi ;-) Tu sais bien, quand on aime... Enfin, je comprends qu'il te faille respirer un peu après !
Supprimerje n'ai pas aimé tout ce que j'ai lu de cet auteur... mais je crois aussi que je n'en ai pas lu assez pour me faire un avis définitif!
RépondreSupprimer@Violette : avec sa production très abondante, tu n'as que l'embarras du choix pour t'y remettre ;-)
SupprimerJe n'ai jamais tenté JCO tu sais, j'avais cru comprendre que son oeuvre était assez inégale finalement. Bien que je ne sois pas très "nouvelles", peut-être néanmoins que je commencerai pas ce format pour voir si j'adhère à son écriture et à son propos, même si je note sa " cruauté maupassantienne", il n'y a que toi pour évoquer cela mine de rien (j'aime).
RépondreSupprimer@Galéa : assez inégale mais avec l'âge, même ses nouvelles deviennent au niveau de ses romans ! Je suis totalement bluffée... sous le charme, admirative et tout et tout...
SupprimerBen oui, désolée pour la "cruauté maupassantienne", c'est venu tout seul ;-)
Sinon, tu peux commencer par "Les Chutes", autrement dit directement par un chef d’œuvre.
j'avais déjà noté les Chutes et je crois que c'était chez toi l'année dernière
Supprimerbisettes
@Galéa : sûrement car ce fut mon coup de cœur de l'an dernier ! J'ai complètement craqué sur ce grand grand roman. Bises et bon dimanche !
SupprimerC'est incroyable qu'elle n'ait jamais eu le prix Nobel. Il me semble que c'est une injustice. Peut-elle écrit-elle trop et que cette prolixité lui fait du tort? C'est vrai que tous ses livres ne sont pas au même niveau mais même lorsqu'ils le sont moins, ils sont bons! Maupassant, oui, mais en plus violent et plus féministe!
RépondreSupprimerLe seul bémol dans mon admiration, sa prise de position par rapport à Charlie!
@Claudia : ah ! je suis contente de voir que toi aussi tu trouves cela totalement injuste ! Côté production, je la compare à Balzac... avec du bon et du moins bon du côté des nouvelles.
SupprimerTu as raison pour le féminisme, c'est très net dans son œuvre, et c'est pour cela que je l'aime aussi.
Je suis intriguée par ce que tu dis de sa position sur Charlie, je ne suis pas au courant : qu'a-t-elle dit ?
Va voir ici
RépondreSupprimerhttp://www.lefigaro.fr/livres/2015/05/04/03005-20150504ARTFIG00145-204-auteurs-s-opposent-a-la-remise-du-pen-award-a-charlie-hebdo.php
Mais je ne retrouve pas ce qu'elle a dit, elle, en particulier : en gros, elle dit que Charlie est antiféministe et raciste.
@Claudialucia : j'y vais de ce pas ;-) merci pour le lien !
SupprimerJ'ai encore tant de romans de JCO à découvrir, je passe les nouvelles.
RépondreSupprimerJ'ignorais la polémique autour du PEN Club, je vais me renseigner.
@Tania : avant de découvrir le commentaire de Claudialucia, je l'ignorais aussi...
SupprimerUne auteure que j'apprécie beaucoup , je n'ai pas lu celui-ci , j'ai du mal avec les nouvelles.
RépondreSupprimer@Aude : je ne suis pas une fan de nouvelles non plus, mais ici, j'ai été conquise !
Supprimer