lundi 9 octobre 2017

La Fuite de Paul-Bernard Moracchini


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     Entre mes deux déceptions de la rentrée littéraire 2017 (pour les plus courageux, billets ici et ), il y a eu la lecture fébrile de La Fuite de Paul-Bernard Moracchini, écrivain niçois. Après des vacances passées loin du monde et des "réseaux", qu'ils soient hertziens ou numériques, ce premier roman ne pouvait que me parler. En effet, il s'agit de l'histoire d'un homme qui décide de fuir la société moderne pour partir, nouveau Walden, vivre au fond des bois. Le roman s'ouvre donc sur son départ en train. Les contemporains de cet homme en fuite (on ne sait trop, au départ, quel est le sens de cette échappée) ne trouvent décidément pas grâce à ses yeux. Son regard sur eux mélange mépris et lucidité, mais aussi une sévérité intransigeante : "Ce qu'il y a de terrible... c'est qu'ils auront beau la suer toute leur vie, cette médiocrité, jamais ils ne l'élimineront, jamais !".
   Ainsi, le ton est donné. C'est avec un sens de la comparaison acerbe et cinglant que notre ermite part rejoindre le domaine forestier : "une fourmilière sous la pisse, c'est comme un cortège sous l'orage", lance-t-il, en route vers une hypothétique libération.
   Arrivé au fond de ses bois, il s'installe dans une vieille cabane et va vivre de la chasse. Au cours de ses nombreuses marches en forêt, il va rencontrer un chien qui va devenir son compagnon et qu'il va baptiser Lione. C'est d'ailleurs la chasse qui va donner la scène la plus marquante du roman, celle de la rencontre avec un "maquin", vieux sanglier rusé qui a plus d'un tour dans son sac. Mention spéciale ici à l'utilisation intelligente, et poétique parfois, de mots venus du fond des âges, mots de la chasse ou de la langue d'oc. Ils disent la nature, les arbres qui parlent et les sentiers empruntés par les bêtes. Et le lecteur les emprunte, ces sentiers, happé qu'il est par l'histoire de cet homme solitaire. Et tout en suivant la mise en place de son "économie de subsistance", on découvre petit à petit son ancienne vie. Des fragments de vie épars permettent de reconstruire ce qui a pu le mener à ce départ radical
   Mais de manière subtile s'opère un changement qui nous fait ensuite basculer dans une histoire qui m'a rapidement fait penser au Horla de Maupassant. Alors bien sûr, ceux qui connaissent ma passion pour le grand romancier naturaliste, se doutent que cela n'aura pas gâché mon plaisir... mais n'aura fait que le renforcer ! Je ne vais pas vous dévoiler plus avant cette histoire "d'âme perdue"... Je vous invite simplement à vous précipiter sur cette petite perle de la rentrée littéraire, qui propose une vraie réflexion tant sur la société contemporaine que sur notre capacité à nous en éloigner. Un petit roman de 150 pages qui a du coffre, lu en une journée, et qui tisse encore sa toile autour de ma mémoire. Autour de lui volètent quelques mots inconnus comme "draille", "maquin", "banne", ils sentent bon les sous-bois et les feuilles mortes qui craquent sous les pattes d'un chien trottinant dans la brume du petit matin...

https://delivrer-des-livres.fr/challenge-rentree-litteraire-2017/

22 commentaires:

  1. j'espère qu'il y a un glossaire langue d'oc-langue d'oïl :-)

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    1. @Adrienne : mais oui, il y a quelques petites notes ;-)

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  2. Tu m'appâtes là, tu m'appâtes sérieusement ..... ;-)

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    1. @Aifelle : j'espère bien ! c'est un vrai coup de cœur ;-)

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    1. @FondantGrignote : ne t'en prive pas ! il se lit d'une traite et on ne l'oublie pas.

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  4. Un petit roman qui a l'air magnifique. Merci pour le conseil.

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    1. @Alex : oui, le premier coup de cœur de cette rentrée et je trouve très bien que cela soit un 1er roman !

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  5. Merci pour la découverte, une couverture magnifique en plus :)

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    1. @Emma : c'est vrai que cette couverture est belle, elle ressort bien sur cette image :-)

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  6. La thématique me parle beaucoup aussi, cette réflexion sur notre société et notre capacité à nous en éloigner. Ton billet me donne bien envie de découvrir ce roman en tout cas. Et puis 150 pages, ça ne devrait pas trop perturber ma PAL ! Merci pour cette découverte !

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    1. @AGirl : il est vrai que le format "court" ne fait pas prendre trop de risques ;-)Il se lit un peu comme une longue nouvelle.

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  7. Tout çà fait ce qui me convient pour ces jours-ci, entre marrons et des feuilles mortes. Encore faudra-t-il le trouver sur les présentoirs et étagères de mes bibliothèques.

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    1. @Chritw : il faut avouer qu'il est, en plus, de saison en ce mois d'octobre ;-) Comme il est sorti pour la rentrée littéraire, avec un peu de chance, il sera chez ton libraire !

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  8. celui là je note car c'est un thème pour lequel je suis toujours partante, de mon côté du même ordre je te conseille le premier livre de Cognetti qui vient de faire paraitre un très bon roman, le garçon sauvage, excellent ( tu trouves le billet sur mon blog)

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    1. @Dominique : ah, je viens d'aller lire ton -beau- billet sur "Le Garçon sauvage". En effet, il a tout pour me plaire... J'étais passé complètement à côté de ce billet d'ailleurs, peut-être paru dans une période où j'étais "hors blogo" ;-)

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  9. Un auteur niçois en plus !!!!!! Je ne connaissais pas du tout. Je suis assez tentée mais j'ai peur d'une narration très introspective genre (le narrateur avec lui-même), est-ce qu'il y a autre chose (des bribes de sa vie d'avant, des explications à sa fuite par exemple)?

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    1. @Galéa : non non, pas de narration très "introspective" ou type "éditions de Minuit" (hum, je vais me faire des ennemis là, en plus, j'aime bien certains de leurs auteurs...). On découvre petit à petit, par bribes comme tu le dis des épisodes de sa vie d'avant.

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  10. Avec ce type de récit, j'ai souvent ressenti de l'agacement puisque les personnages qui s'isolent ont souvent tendance à se sentir mieux que les autres (en littérature en tout cas). J'aime être interpelée, mais méprisée, non.
    Tu attises cependant ma curiosité avec la référence à Maupassant.

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    1. @Lilly : je trouve qu'il a évité justement le travers que tu évoques. Alors bien sûr il y a des passages où il se laisse aller à sa détestation de l'époque mais ils sont loin d'être majoritaires et sont compensés - et expliqués en partie - par ce que l'on apprend (par bribes) de son passé. Et quand on entre dans les "effets maupassantiens", quel plaisir ;-) J'ai depuis lu un échange avec l'auteur où il évoque cette nouvelle qui l'a bel et bien inspiré...

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  11. un beau billet convaincant! Je le note dans un coin de ma tête ...quand j'aurai besoin de fuir!

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    1. @Violette : souhaitons que tu n'aies pas envie de fuir trop vite... mais tu peux aussi le lire en voulant rester ;-)

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