Dans le premier chapitre intitulé "Les avoir", il y a "Elle". "Elle" vit avec sa mère, qui se fait bronzer nue sur sa terrasse. "Elle" vit avec son père, qui montre sa bite les jours de kermesse, ce qui rend l'intégration à l'école difficile... Remarque de la rédactrice de ce billet : le mot bite, dans ce roman, revient de manière lancinante et répétitive, donc, autant vous y faire tout de suite... Et puis, il y a le voisin, M. Bihotz, avec sa chambre ornée d'un poster de France Gall et dont la maison sent "le chien et la soupe". "Elle" s'appelle Solange, du nom d'une sainte qui préféra la mort à la défloration. Sa meilleure amie se prénomme Rose. Elles habitent à Clèves, en province, dans le sud-ouest de la France, seule localisation un tant soit peu précise. Le père de Rose appelle les deux filles les "princesses de Clèves". Le roman déroule en trois chapitres l'obsession qui devient celle de Solange et donne son titre aux deux chapitres suivants : "Le faire" puis "Le refaire"... L'ensemble du récit déroule donc le parcours d'une jeune fille en quête de la volupté amoureuse. Cette difficile quête de l'amour physique sera l'occasion de bien des ratages dont certains virent au franchement glauque, mais je vais bien me garder de vous en dire plus sur le parcours suivi...
J'ai pensé, en lisant ce roman, à un anti-Princesse de Clèves. Après avoir écouté l'excellente interview de Marie Darrieussecq ci-dessous, ce n'est pas tout à fait cela, mais elle a bien utilisé des éléments de la trame narrative du roman de Mme de La Fayette pour élaborer son récit. Cela pourrait être amusant de lire les deux en parallèle mais je n'ai pas eu le temps nécessaire... Une idée pour cet été ?...
Au niveau de la forme, le roman se présente sous la forme d'une suite de paragraphes très courts, parfois composés d'une simple phrase. Cela produit un effet de type fragmentaire, à l'égal de pensées cahotiques. Les blancs qui séparent les paragraphes semblent marquer des pauses successives qui rendent la lecture heurtée, à l'image d'une pensée hésitante que l'on ne peut qu'associer à Solange. En effet, ce personnage, sous des dehors de fille délurée, cache de nombreux doutes et se révèle vite être complètement paumée.
Malgré la crudité de certains passages, j'ai aimé ce roman pour les questions qu'il pose : où en sont les rapports hommes-femmes ? Quelles pressions subissent les jeunes filles d'aujourd'hui (les pressions avancent masquées, mais elles sont réelles...) ? Le roman se déroule dans les années 80 mais il est très actuel dans ses questionnements.
Je n'avais pas lu Marie Darrieussecq depuis Truismes... ce roman m'a donné envie de le relire, mais aussi de m'intéresser de plus près à une oeuvre qui, si elle avance sous des dehors hétéroclites, me semble finalement présenter un fil directeur bien intéressant !
Extrait
"A la piscine Raphaël lui a attrapé les seins par derrière, elle s'est débattue mais il ne lâchait pas. Il s'est vanté ensuite à ses copains.
La copine de Georges et sa mère discutent entre les monceaux de coquilles et il ne s'agit, apparemment, ni de Georges ni de son père, mais d'elle. Du fait qu'elles n'ont pas de serviettes et que tout est encore fermé. Du coton, ça risque de glisser, mais un tampon ça paraît difficile. Non ?
La copine de Georges est d'avis que non. Difficile pourquoi ?
"On voit que ce n'est pas ta fille, dit sa mère. En CM2. Il ne manquait que ça. Le tableau est complet."
Elle fume en contemplant la terrasse comme un horizon atomisé."
Ce roman ne fait pas l'unanimité et il est en tout cas sujet à discussion. En effet, j'ai lu à son sujet des commentaires positifs mais aussi négatifs! Ceci dit, à force de voir tant d'avis différents cela me donne envie de le lire pour me faire le mien!
RépondreSupprimer@Elisabeth : je comprends fort bien qu'il ne fasse pas l'unanimité... sans doute à cause de la crudité de certains passages. Et je n'ai pas trouvé que des points positifs, loin de là. Toutefois, j'ai aimé les questions qu'il pose !
RépondreSupprimerJ'ai lu ton article avec attention, je ne lis plus du tout Marie Darrieussecq . J'ai lu "truismes" que j'avais aimé, mais par contre je n'ai pas du tout apprécié le dédain de son auteur pour ce premier livre qui a fait un record de vente, ensuite j'ai lu le 2ème que j'ai eu un mal fou à finir que j'ai trouvé complexe et prétentieux, ensuite j'ai trouvé que Marie Darrieussecq devenait de plus en plus prétentieuse elle aussi, à chaque rentrée on a Amélie Nothomb et Marie Darrieussecq, il y en a une qui se prend moins au sérieux que l'autre quand même, pourtant ces deux là se valent bien !!! et du coup je ne l'ai plus du tout lu. Mais tu présentes tellement bien son livre que je vais peut-être le lire. Je vais le mettre dans ma prochaine commande à mon boulot. Merci pour ce très intéressant article.
RépondreSupprimer@Nina : merci pour cet avis qui me fait plaisir ! Voilà qui va peut-être me remettre un peu à mon clavier que je délaisse pas mal en ce moment... Je pense que je vais m'attarder un peu sur l'oeuvre de M. Darrieussecq, afin de m'en faire une idée plus précise. Mais j'ai surtout envie de comparer avec attention ce dernier roman avec la Princesse de Clèves ;-) Bonne journée à toi
RépondreSupprimerj'ai vraiment beaucoup de mal avec les auteurs français actuels et à quelques exceptions près je n'accroche pas du tout, ce n'est pas forcément une question de talent mais plutôt la façon choisie pour traiter des sujets
RépondreSupprimerJ'ai lu ton billet avec intérêt car il est modéré et attentif mais je ne suis pas convaincue de la lire pour autant
@Dominique : tu n'es pas la seule à avoir cet avis... Je pense que la suffisance affichée par certains de nos auteurs n'est pas étrangère au rejet dont est victime la littérature française contemporaine. C'est bien dommage car il existe des auteurs plus confidentiels (car pour certains plus discrets...) qui méritent vraiment le détour. Dois-je citer Sylvie Germain ? ;-) Merci pour cette lecture attentive !
RépondreSupprimerest-ce que quelqu'un a pu voir l'interview?
RépondreSupprimerchez moi s'affiche un message d'erreur quand je clique...
j'ai lu attentivement ton billet, Margotte, moi aussi :-)
OK ça marche maintenant :-)
RépondreSupprimerbonne soirée!
@Adrienne : ça marche pour moi... et pour toi aussi maintenant je crois ! Bonne écoute, et merci pour cette lecture attentive ;-)
RépondreSupprimerOh oui, cite Sylvie Germain, s'il te plait !
RépondreSupprimerDe Darrieussecq, j'avais lu "Le bébé" (je venais d'en avoir un) et ce texte renvoyait à une expérience de maternité sans tabou, sans gnagnan béat, genre le-plus-beau-jour-de-ma-vie, l'aboutissement-de-mon-existence... Bref, je dois beaucoup à cette dame.
@Za : comme je souhaite découvrir ses autres livres, je garde "Le bébé" en tête...
RépondreSupprimerje ne connais rien de cet auteur mais, je ne sais trop pourquoi, ça ne m'attire absolument pas!
RépondreSupprimer@Violette : après "Truismes", j'avais abandonné et c'est une discussion avec une collègue qui m'a fait acheter celui-ci... qui me donne envie d'aller lire les autres ! A suivre ;-)
SupprimerCe roman de Darrieussecq ne me tente pas en revanche je me souviens avoir beaucoup aimé La princesse de Clève de Madame de La Fayette...le style est magnifique.
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