samedi 31 août 2013

Fantaisie estivale


Alors que la rentrée s'approche à grands pas... il faut l'avouer, je ne suis pas, mais alors pas du tout "dans le mouv'". Est-ce un effet distant mais tenace d'Ouessant ? Ai-je trop pris le soleil ? Je ne pense qu'à retourner au bord de l'eau j'ai enfin réussi à revenir en ville, mais ce fut laborieux et je vous fais profiter, pour le dernier week-end de ce beau mois d'août, d'une fantaisie trouvée sur la plage hier matin (Galéa, je suis sûre que tu vas aimer).
La semaine prochaine, je vous parle du dernier roman de Cécilia Coulon, dévoré en une journée et à lire en cette rentrée !
Pas de bilan de l'été, ni de challenge de rentrée pour moi : au contraire, j'allège et avance au gré du vent... 
Je vous souhaite un excellent week-end,
Margotte

mercredi 28 août 2013

Rentrée littéraire 2013 # 1 - Petites scènes capitales de Sylvie Germain


Comme je l'ai déjà évoqué ici, j'attendais avec une impatience non dissimulée le nouveau roman de Sylvie Germain. Tout d'abord parce qu'il s'agit de mon écrivaine préférée, mais aussi parce qu'elle revient ici à la fiction après une pause de quatre ans. En effet, après plusieurs essais, Le monde sans vous où elle évoquait, au travers d'un voyage dans le Transibérien la mort de ses parents et Rendez-vous nomades, elle a rédigé plusieurs ouvrages s'ouvrant franchement sur le religieux : trois en 2011, Quatre actes de présence, Chemin de croix et Octonaire (je n'ai pas lu les deux derniers). 
L'écrivaine revient donc ici à la fiction et elle nous propose l'histoire d'une vie, celle de Lili, née dans l'après-guerre, comme à la suite de Nuit-d'Ambre, l'enfant né après toutes les guerres. L'enfance de la petite fille est marquée par la perte de sa mère. Morte en mer ou disparue, le doute flotte sur cette disparition. Lili va donc être élevée par son père qui "un jour congédie leur solitude à deux" : il se remarie. L'enfant se voit donc affublée d'une nouvelle famille avec trois filles, Chantal, Christine et M. Joye, un garçon, Paul, et une belle-mère, Viviane. Tout se déroule assez bien jusqu'à ce qu'un terrible événement vienne introduire une rupture sans retour dans la vie de chacun. Je ne vous dévoile pas plus l'intrigue... qui explique un changement de rythme narratif. Le début du livre, assez lent, se déroule comme l'âge de latence, sans trop de vagues, simplement empli de ce qui fait les souvenirs d'enfance, la lumière d'un été ou la taille d'un arbre gigantesque pour les géants. Puis la rupture vient bouleverser la donne et accélérer le rythme de l'intrigue avant que le dernier tiers de l'ouvrage change encore une fois de cadence.


J'ai retrouvé dans ce roman tout ce qui fait que la prose narrative de Sylvie Germain est aujourd'hui, pour moi, l'une des plus riches du monde littéraire français (et oui, rien que ça !). Pour faire court, je vous propose trois thèmes récurrents qui la caractérisent au travers d'extraits :

1. Le goût des mots qui s'exprime au travers d'une prose poétique lumineuse : "Et puis, comment décrire le goût des mots-lumière qui l'ont traversé ? Il a senti leur saveur scintiller dans sa bouche, comme si chaque mot était un fruit odorant à la pulpe tendre, aigrelette, rafraîchissante, miellée, brûlante, ligneuse, acidulée, tiède, il est incapable de préciser." 

2. Une écriture des couleurs qui transforme la représentation du monde : "Elle aime les fleurs, elle peut rester des heures à contempler un bouquet. (...) Pour elle, les pétales des anémones sont des doigts ronds disposés en cercle autour d'une paume noire ou jaune, ceux des roses des paupières, ceux des iris, des langues bleues et mauves d'avoir léché le ciel, et les boutons-d'or sont de petites oreilles à l'écoute du soleil." 

3. Une appétence à la vie qui fait que chaque roman est un parcours initiatique vers une forme de délivrance :
"Le goût du sucre à demi-fondu, gorgé de chaleur, d'amertume et de vagues parfums de feuilles et d'écorce - juste cela, cette saveur dans la bouche, la fine brûlure dans la gorge, la sensation toute simple, très nue, très forte, d'être en vie. En vie. (Il ne s'agit pas de la fin du roman...).

Nous avons donc ici un roman qui se place dans la lignée de L'Enfant Méduse et de la Chanson des mal-aimants. Il propose un parcours sur lequel se trouvent placées des "scènes capitales". Celles-ci peuvent être tissée sur la beauté pure, ou, à l'inverse, s'apparenter à une fulgurante violence. Chaque scène vient nourrir et ré-orienter la vie de Lili. Ces scènes sont souvent ce qui reste des lectures de Sylvie Germain qui sont de celles que l'on oublie pas, que ce soit la mort du cheval Escaut dans Le Livre des Nuits ou le tragique accident qui tranche la vie de Lili. L'écriture de la romancière, entre douce mélodie et motifs "forte" nous propose une musique vivace qui n'a pas fini de nous émerveiller...

Je m'en vais d'ailleurs écouter maintenant l'écrivaine puisque Albin Michel nous propose toute une page sur son nouveau roman, avec des vidéos. Si vous voulez en profiter aussi, c'est ICI.

lundi 26 août 2013

Lectures de vacances # 1 - Calibre de Ken Bruen



Ce que j’aime chez Ken Bruen, c’est qu’il est tout sauf ingrat. Non seulement il affiche avec ostentation ses sources d’inspiration, mais en plus il en joue, et avec humour ! Ainsi, dans ce quatorzième roman qui narre avec entrain les dernières aventures de Brant le mal luné, tout commence par une citation tiré du décoiffant roman de Jim Thompson, Le démon dans ma peau (âmes sensibles, passez votre chemin et priez pour le salut de l’humanité) : « Huh-uh, dit-il, ce n’est pas ça ». 
A Londres, un drôle de lecteur (qui lui, n’a pas le sens de l’humour et ne supporte pas les malpolis), fasciné par ce roman policier, décide d’accélérer le passage ad patres de tous les mal élevés. Comme quoi, il y en a qui n’ont pas peur des défis impossibles… Alors, quand il croise un malotru qui engueule sa femme, un père odieux qui claque un gosse qui n’a rien fait ou un chef qui confond sa fonction avec celle de kapo, il passe à l’action : rayé de la carte, le fâcheux ! Et comme il a intégré les quotas, il pratique aussi la suppression de la mal embouchée.

Mais très vite, l’ego du tueur ne se contente pas d’œuvrer dans l’ombre, alors il envoie des lettres à la police. Et quelle surprise va être la sienne lorsque (les voix du seigneur sont impénétrables) il se rend compte qu’au sein même de cette noble institution règne un despote encore plus malpoli que tout ce qu’il a déjà pu voir : le sergent Brant.

Alors que notre policier, fervent admirateur de Mc Bain, envisage une reconversion dans l’écriture… de polars, la rencontre avec le zélote de Jim Thomson va venir lui ouvrir de nouveaux horizons…

Voilà du Ken Brun pur jus : les flics y sont toujours de mauvaise humeur et les femmes n’ont pas comme seul rêve celui de voir débarquer un Roméo les bras chargés de roses. C’est politiquement incorrect et moi, dans une période où on pourchasses les pauvres fumeurs qui ont le malheur de s’en griller une à l’abri d’une terrasse, ça me fait chaud au cœur ! Le suivant, c’est pour quand ?

Extrait

Merde en branche. Faut reconnaître, mec, que ces foutus Amerloques ont des expressions géniales. J’adore leur façon de jurer.

J’ai tué pour la première fois mardi dernier. Je n’arrive pas à croire que ça ait été aussi facile. Des remords ? Pas la queue d’un. Je regrette seulement de ne pas avoir commencé plus tôt.

J’ai quarante-quatre ans et je suppose que je suis ce qu’on appelle un type qui a mis du temps à trouver sa voie. Long à la détente, comme disent les Amerloques. J’aurais pu buter des cons depuis trente ans et qu’est-ce que je faisais ?

Je travaillais.

Un zombie.
Je crois que c’est Bob Geldof qui a dit que c’était la plus grande escroquerie.  

samedi 24 août 2013

Le salon du livre insulaire à Ouessant


Voilà un billet bien difficile à écrire... En effet, partie pour un salon du livre insulaire, je suis tombée amoureuse d'une île, et si nous avons passé un peu de temps au salon du livre nous avons surtout arpenté les chemins buissonniers, accompagnées par les mouettes, le vent... et un soleil estival que je n'imaginais pas si intense une fin août ici. Alors, au lieu de passer deux jours avec un ciel comme ça (la photo a été prise à l'aller) :


l'ambiance a été franchement estivale, avec ces paysages :


Alors bien sûr, difficile de résister à l'appel de l'eau qui ici, est partout. Ouessant est une île-navire où l'on ne peut marcher longtemps sans voir la mer tant et si bien qu'on ne l'oublie jamais. Elle se fait présence constante et l'on passe son temps le nez au vent ou les yeux tournés vers les nuages (n'est-ce pas Moustafette ?) afin de prédire les conditions météorologiques à venir. Les maisons elles-mêmes deviennent plages, avec leurs murs rehaussés de galets ronds ou leurs bateaux au fond du jardin. Les gens y sont bourrus, le parler franc et dédaignant visiblement tout effet de style de type ostentatoire. A imaginer l'hiver ici, je les comprends... Enfin, plus qu'un salon du livre, j'ai découvert ici un lieu, de ceux qui vous habite, que vous y retourniez ou pas. 


Mais pour évoquer le salon du livre où nous sommes allées tout de même... Les allées, comme l'île, n'étaient pas gorgées de monde et nous avons pu flâner tranquillement sans être bousculées (une des hantises du ouessantin lorsqu'il retourne sur le continent...). Nous avons assisté à la remise des prix du concours de nouvelles et entendu une conférence passionnante sur la Tasmanie (par Eric Auphan). Côté achats, ce fut très raisonnable (marcher le nez au vent ne coûte rien et empêche de lire...). Et comme je sais que vous êtes nombreuses à boire du thé, voilà un lieu fort sympathique pour une pause :


Je sais, j'ai peu parlé de livres, mais je vais bientôt me rattraper puisque je suis plongée dans le dernier Sylvie Germain, acheté dès mon retour sur le continent (il fallait bien ça pour ne pas reprendre immédiatement la mer, direction plein ouest...). Bon we à vous !

PS : merci à celles qui sont venues mettre un petit mot sur mon billet précédent, ce billet leur est dédié ;-)

lundi 19 août 2013

Festival du livre insulaire à Ouessant - Le départ




En route pour Ouessant je suis
Et viendrai vous raconter bientôt
Mes aventures insulaires...
Que l'été vous soit encore doux,
A bientôt,
Margotte

samedi 17 août 2013

Les hommes sirènes de Fabienne Juhel

   J’ai suivi cet été les chemins buissonniers de la lecture. Au gré du vent, je me suis laissée bercée par le hasard… qui a apporté son lot de belles surprises. Ainsi, après avoir lu L’angle du renard (désolée, je n’ai pas rédigé de billet mais vous pouvez en trouver un chez Anne qui correspond tout à fait à mon avis), j’ai profité du temps disponible pour continuer ma découverte des romans de Fabienne Juhel avec Les bois dormants puis Les hommes sirènes. Me reste à lire La verticale de la lune, Les oubliés de la lande et une enquête de Léo Tanguy pour avoir fait le tour d’une œuvre en devenir, à l’écriture sorcière comme je les aime.
Les hommes sirènes nous conte (le mot prend ici tout son sens) l’histoire d’Antoine, un homme qui décide un jour de laisser clés, femme et enfant pour partir sur les routes qui mènent vers des temps meilleurs. Adopté à deux ans par un couple de rescapés des camps de la mort, il est lesté des brumes du Mal qui hantent les survivants de cette période de haute barbarie. L’homme porte donc un fardeau dans lequel se mêlent ses origines, son enfance et un lourd secret. Sa volonté de s’en libérer le mènera de St Malo aux Saintes-Marie-de-la Mer, en passant par la Normandie. Il rencontrera le long des chemins de son périple des femmes qui le guideront vers la redécouverte de lui-même.
Un très beau roman d’initiation où l’on retrouve une écriture très poétique, parsemée de fulgurances colorées. Les images, teintée d’enfance et de l’univers des contes, laissent une empreinte de pas d’ogre. On y fait l’amour « comme on construit une cabane » et les femmes se transforment en fée ou en sorcière magnifique. Fabienne Juhel sait faire bruire la langue du revers du monde et laisse à voir les dessous des chemins. Pour cela, j’attends avec grande impatience son prochain roman que je rangerai en terre d’imaginaire, entre Le Livre des Nuits de Sylvie Germain et... Le domaine des murmures de Carole Martinez.