Commencer un livre en début
d’année est toujours chose compliquée… En effet, il s’agit de choisir celui qui
permet d’entrer dans un nouveau cycle de manière « positive » si
possible (vous trouverez ici, celui de l’an dernier). Je ne pouvais mieux
choisir en sélectionnant dans ma PAL - qui ne mange pas de chocolat mais qui
prend du poids quand même – le dernier roman d’Hubert Mingarelli. C'est une ode à la
tendresse humaine et à la fraternité dans ce qu’elle a de plus fragile.
L’histoire débute en Israël, sous
le lac de Tibériade, près de Beit Zera. Stépan Kolirin, un vieil homme, habite
une maison où il n’a pour seule compagnie que sa vieille chienne malade. Il
envisage de mettre fin aux jours douloureux de l’animal tout en s’occupant
d’elle avec douceur. Un jour, un jeune arabe s’approche de la véranda et de la
chienne. Il va ensuite revenir, toujours silencieux, pour partir se promener
avec l’animal, établissant un étrange rituel attendu par le vieil homme et la
chienne. Stépan, intrigué par ce gamin bizarre, s’habitue pourtant à lui tout en
continuant à écrire tous les jours à son fils Yankel qui habite « à
l’autre bout du monde ». Je n'en dis pas plus sur l'intrigue... si vous voulez savoir pourquoi le fils est parti si loin et où, vous savez ce qui vous reste à faire...
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Lac de Tibériade |
J’ai pris beaucoup de plaisir à
lire cet ouvrage d’un auteur que je ne connaissais pas du tout. En 157 pages,
il traite avec beaucoup d’humanité du conflit israélo-palestinien, mais presque
sans le dire…
Difficile de rendre compte de l’atmosphère qui règne dans ce roman. Tout y est
teinté de douceur et de respect. Le rythme, lent mais jamais ennuyeux, nous
porte tout naturellement à vouloir en savoir plus sur les personnages auxquels
on s’attache très vite. Dès le premier chapitre, nous voilà installés près de
Stépan et l’on se prend à avoir envie de caresser la tête de la vieille
chienne. Enfin, pour conclure, le genre d’ouvrage qui fait du bien à l’âme,
qu’on a envie d’offrir, qui donne plus envie de se taire que de parler pour ne
rien dire. Je crois que je peux le ranger dans la catégorie de mes "précieux", il
prend donc sa place dans les pépites du non-challenge de Galéa, ne serait-ce que
pour cette merveilleuse scène du rire dont je vous propose un extrait
ci-dessous.
Extrait
Chacun pour soi se rappelait ce jour-là, devant Jaffa, pendant leur
service militaire. Ils fouillaient les Arabes à midi. La chaleur montait de la
route comme de l’eau chaude d’un bassin. Le soleil les tuait tous. (…) Ils
étaient une centaine à attendre leur tour pour entrer dans Jaffa. Soudain un
vieillard sortit de la file, s’avança, passa à côté de Stépan et Samuelson sans
un regard, sans l’ombre d’une crainte, et s’éloigna. L’officier leva une main et posa l’autre sur son étui à révolver.
Stépan et Samuelson, abandonnant les deux qu’ils fouillaient à ce moment-là, se
redressèrent, fixèrent un moment le dos du vieillard qui s’en allait sans les
craindre, puis éclatèrent de rire, et tous les Arabes qui attendaient leur tour
éclatèrent eux aussi d’un rire si extraordinaire qu’il couvrit celui de Stépan
et Samulson. L’officier devint rouge de colère, mais demeura muet. Il faisait
trop chaud.
Je remercie les éditions Stock et Valentine L. pour cet envoi et cette
excellente surprise de début d’année ! Le livre est sorti avant-hier en
librairie...