Vous aimez les contes et les
histoires fantastiques ? Les dames noires qui hantent les vieilles pierres
vous font frémir ? Vous avez un faible pour les statues qui parlent ?
Alors ce livre est pour vous. Je ne connaissais absolument pas cette
historiette écrite par George Sand pour sa petite fille Aurore âgée de sept
ans. L’écrivaine a soixante-neuf ans lorsqu’elle rédige durant l’hiver 1873 ce
conte paru sous la forme de feuilleton dans Le
Temps. Il prendra ensuite sa place dans le premier volume des Contes d’une grand-mère.
L’histoire suivie de mon avis
M. Florchardet, peintre de son état, ramène du couvent sa fille unique
de huit ans, Diane. Cette dernière a été placée en pension car sa
belle-mère, Laure, une femme aussi frivole que peu maternelle, préfère
s’occuper de rubans plutôt que d’une petite fille qui a le malheur d’avoir
envie d’autre chose que de servir de poupée que l’on habille de frous-frous.
Lors du voyage qui mène le père sa fille et leur cocher près d’Arles,
alors qu’ils traversent le Gévaudan, la voiture est victime d’un accident qui
oblige le trio à passer une nuit au château de Pictordu. L’endroit est
abandonné et presque entièrement en ruines. La petite fille, fiévreuse lors de
son arrivée au château, croit apercevoir une « Dame au voile » après
avoir vu une statue l’inviter à entrer dans la demeure… Les lieux sont-ils
véritablement hantés, comme l’affirme une légende tenace ?
Qu’adviendra-t-il de Diane, jeune fille orpheline de mère en route vers la
demeure paternelle ? Qui est la « Dame au voile » ? Autant
de questions qui rendent la lecture de ce texte bien agréable !
On retrouve ici ce qui fait le
charme de la littérature du XIXe, une écriture à la fois exigeante
et limpide. Écrit
pour un journal, le texte de divise en dix chapitres titrés qui invitent
toujours à poursuivre la lecture… On
ne s’ennuie pas une seconde, et on s’amuse à retrouver les motifs propres au
fantastique de l’époque : une fresque qui s’anime, des fantômes, une
statue qui bouge, etc. La lecture fut d’autant plus agréable qu’elle
associe au plaisir lié à l’intrigue un plaidoyer pour l’éducation des filles
bien éloigné des standards de l’époque. George Sand milite ici pour l’égalité
homme/femme et souhaite que les filles puissent se consacrer à l’art, quel
qu’il soit, de la même manière que les hommes.
Extrait
« A peine avait-elle pensé cela, que la lanterne s’éteignit et
qu’elle vit une grande belle clarté bleue, comme celle de la lune, traverser la
salle ; et dans ce rayon de lumière douce, elle vit que la danseuse
antique avait quitté la muraille et venait à elle.
Ne croyez point qu’elle en eut peur, c’était une forme exquise. Sa robe
faisait mille plis gracieux sur son beau corps et semblait semée de paillettes
d’argent : une ceinture de pierreries retenait les pans de sa tunique légère ; un voile de gaze brillante
était roulé sur sa chevelure qui s’échappait en tresses blondes sur ses épaules
blanches comme neige. On ne pouvait distinguer son visage à travers cette gaze,
mais il en sortait comme deux pâles rayons à la place des yeux. Ses jambes nues
et ses bras découverts jusqu’à l’épaule étaient d’une beauté parfaite. Enfin la
nymphe incertaine et pâlie de la muraille était devenue une personne vivante
tout à fait charmante à regarder. »