dimanche 24 mai 2015

Etonnants voyageurs 2015

 

   Quelle journée ! J'ai eu la chance de pouvoir me rendre aujourd'hui à St Malo pour profiter un peu du festival Étonnants voyageurs, et je n'ai pas été déçue par les rencontres du jour. Après un petit tour au traditionnel café littéraire du Palais du grand large, un grand tour au salon du livre. De nombreux auteurs étaient présents aujourd'hui. Je suis ravie d'avoir pu échanger avec Cécile Coulon qui, en plus, s'est prêtée gentiment à la photographie (et à la dédicace) pour dame Margotte.

Cécile Coulon, St Malo, 2015
   Après avoir parlé cinéma avec Fabrice Bourland à qui j'ai acheté son dernier roman, Hollywood monsters, direction les remparts afin de grignoter un morceau en bonne compagnie. L'après-midi fut sous le signe de la Série noire. Tout d'abord, une conférence sur la naissance de la mythique collection de Gallimard avec, de gauche à droite : Aurélien Masson (actuel directeur de la série noire), Bertrand Angelier, un animateur, Bertrand Tavernier et Michel Le Bris.


Après cette intéressante mise en bouche, le meilleur restait à venir : un excellent documentaire de Gilles Mimouni, Il était une fois Les Tontons flingueurs (on est fan ou pas...). Ambiance :



Encore une promenade avant de partir et un bilan plus que positif avec finalement peu d'achats (ce qui n'est pas plus mal vu la taille de ma PAL !).


   Une grande place était faite, cette année, à la notion de République (Mona Ozouf était invitée) et une matinée s'intitulait "Être Charlie". Le festival se veut donc à la fois ancré à St Malo mais aussi ouvert sur le monde d'aujourd'hui. Vous pouvez consulter le site du festival pour les détails et voir des conférences ici (je pense, entre autres, à Keisha et à son amour de la littérature des grands espaces, qui devrait être intéressée par la vidéo...).
   Je profite de ce billet pour vous dire que les semaines à venir vont être chargées pour moi et que je vais me faire rare sur la blogosphère. Autrement dit, je pars vers d'autres horizons pour un moment. Si j'ai le temps, je viendrai vous parler du festival de Vannes où j'ai très envie d'aller et avec un peu de chance, j'aurais le temps de rédiger quelques billets cet été. En attendant, bon vent à tous !

mercredi 20 mai 2015

Du côté de chez Swann de Marcel Proust

     
     Proust hésita longtemps sur le titre à donner à son œuvre, à l’ensemble de La Recherche mais aussi à ce premier volume sans cesse remanié, des brouillons à la dactylographie en passant par les ajouts aux épreuves. Du côté de chez Swann, publié chez Grasset en novembre 1913, puis chez Gallimard en juin 1919, aurait pu s’appeler Jardins dans une tasse de thé (j'aime !) ou Le Printemps. Le manuscrit, refusé par Gide pour la NRF (cela restera son regret le plus cuisant), sera édité à compte d’auteur avant de connaître la renommée que l’on sait.
   Divisé en trois livres, ce premier volume présente un côté hétérogène lié à l’intégration d’une histoire d’amour au milieu d’un récit pris en charge par le narrateur. Ce récit s’ouvre par une première partie, « Combray », où apparaissent une partie de ces « moments privilégiés » au centre de l’œuvre proustienne, mais aussi les principaux acteurs de La Recherche : le héros, sa famille, Françoise, Swann, la fameuse tante Léonie, Bergotte et le clan des Verdurin... 

   « Longtemps, je me suis couché de bonne heure. Parfois, à peine ma bougie éteinte, mes yeux se fermaient si vite que je n’avais pas le temps de me dire : « Je m’endors. » Et, une demi-heure après, la pensée qu’il était temps de chercher le sommeil m’éveillait (…) ».
   C’est le récit d’une enfance, celle du narrateur qui se souvient des douces heures du sommeil, de la lecture et des promenades chez sa grand-tante. On y retrouve les grandes scènes de notre patrimoine littéraire : la scène du coucher, la scène de la madeleine, les séances de lecture de François le Champi de George Sand. Les yeux de l’enfance transforme l’ensemble en un précieux livre d’images. Tout y est à la fois coloré et évanescent. Tout y est plein de livres reliés d’or d’où s’échappent des lettres qui s’impriment dans la mémoire. Tout y est anodin tout autant que fondamental. Ce monde premier se clôt sur une « mise en fuite par ce pâle signe qu’avait tracé au-dessus des rideaux le doigt levé du jour. ».

Combray, 2011
    La deuxième partie « Un amour de Swann » nous emporte dans un monde bien différent, celui du clan des Verdurin. Commence un roman dans le récit, celui des amours de Swann pour Odette, cocotte et demi-mondaine. Sur la petite sonate de Vinteuil qui déclanche la mémoire involontaire, Swann se laisse emporter par une passion au dessous de sa condition qui va pourtant le conduire à se laisser aller à une jalousie maladive.

« Ainsi à peine la sensation délicieuse que Swann avait ressentie était-elle expirée, que sa mémoire lui en avait fourni séance tenante une transcription sommaire et provisoire, mais sur laquelle il avait jeté les yeux tandis que le morceau continuait, si bien que, quand la même impression était tout d’un coup revenue, elle n’était déjà plus insaisissable. »
   Lors de cette relecture, j’ai été totalement fascinée par la troisième partie qui, après une rêverie sur les noms de pays, voit le héros déchiré par son amour pour Gilberte, la fille de Swann. Celle-ci, retrouvée aux Champs-Élysées, devient le centre de la pensée du narrateur. L'ouvrage se clôt sur un portrait de la Belle Époque au travers de la description des toilettes des femmes qui se promènent au bois. J'ai déjà entamé A l'ombre des jeunes filles en fleurs et espère vous donner des nouvelles de ce deuxième volume qui, dans la foulée du premier, prend une toute autre saveur...

samedi 16 mai 2015

Projet 52 (20) - Chemin

Pour le projet 52 de Ma'
le thème de cette semaine était chemin...
Je vous emmène donc dans mes bois !
Le chemin est bordé de jacinthes sauvages
et il y a moins de monde que sur la plage...
Bon we à vous !

jeudi 7 mai 2015

Étouffements de Joyce Carol Oates


     En général, mes lectures de JC Oates marchent par deux. Fidèle à la tradition, j’ai donc acheté deux livres de l’écrivaine lors de ma dernière sortie en librairie. J’ai déjà présenté le conte gothique, le livre que voici est un recueil de nouvelles (en attendant que je lise enfin Bellefleur…). J’avoue avoir un peu hésité avant de l’acheter car je trouve que les nouvelles ne sont pas forcément au niveau des romans, comme si la « romancière » avait besoin de temps pour développer tout son savoir faire. Mais enfin, elle a déjà prouvé qu’elle peut accomplir des miracles sur les formats courts avec Folles nuits. Depuis que j’ai lu ce dernier, je ne me refuse rien de cette artiste ! Et en ce qui concerne le recueil dont il est question aujourd’hui, j’ai bien fait car je n’ai pas été déçue du tout, au contraire, j’ai même été agréablement surprise car certaines nouvelles sont vraiment excellentes.
   Les dix récits qui composent le recueil sont tous parus entre 2005 et 2008 dans des revues. Regroupés sous le titre d’Étouffements, ils se tissent tous sur ce thème qui porte les personnages du simple dégoût sans objet à la mort violente. Ma nouvelle préférée est la troisième, « Le premier mari ». Alors que les Chase préparent leur premier voyage en Italie pour fêter leurs dix ans de mariage, Leonard, en cherchant son passeport, tombe sur un paquet de photos entourées d’un vieil élastique. Sur ces vieux Polaroïds, un jeune couple : sa femme « étonnamment jeune » et un homme qu’il identifie rapidement comme le premier mari. Ces quelques clichés vont rapidement devenir une obsession et entraîner un bien sombre enchaînement d’événements imprévus....
   Deux nouvelles présentent le même type de personnage, récurrent chez Oates : des jeunes filles un peu paumées qui étouffent dans leur milieu, chacune en limite de dérapage. On louvoie avec elles, au bord du précipice.
Dans « Strip Poker », Annislee :
« Grande, mince et gauche, j’ai presque quatorze ans, les attaches fines, des yeux noirs enfoncés et une mince bouche ourlée qui m’attire des ennuis, à cause de ce que je dis ou marmonne tout bas ; mes cheveux blond cendré, attachés en queue de cheval, tombent comme une queue de rat mouillée sur mes vertèbres saillantes ; sans cette queue-de-cheval, on aurait pu me prendre pour un garçon, et j’espérais bien rester toujours comme ça, rien de plus dégoûtant qu’une femme adulte en maillot de bain, une femme grasse comme maman et ses amies, que les hommes, les hommes adultes, regardaient pourtant comme s’ils les trouvaient glamour et sexy. »
   Dans « Nulle part », Miriam :
« L’air d’une fille larguée par son petit copain et qui tâche de ne pas pleurer. En plus elle est mineure. En plus elle n’a jamais fait l’amour. En plus elle a eu des nausées, des haut-le-cœur dans l’un des box puants des toilettes, mais rien n’est venu. Un truc qu’il lui avait donné : Tu as besoin de te détendre chérie. »
   La dernière nouvelle, glaçante, « Veine cave », raconte l’histoire du retour d’un ancien combattant. Enfin, elles sont toutes d’une cruauté maupassantienne, imprégnée par la violence des rapports sociaux et l’impact d’une crise économique qui laisse des trous perdus en ruines, perclus de types défoncés à la méth (voir Breaking Bad).
Joyce Carol Oates, c’est l’anti-Hollywood. Elle sait mieux que personne faire entendre toutes les voix de l’Amérique, celles des beaux quartiers, mais aussi celles des pauvres filles mal mariées dans un bled paumé comme dans « La chute ». Mon admiration est toujours aussi intense et j’attends avec impatience le Nobel de littérature pour Mme Oates…

https://leslivresdegeorgesandetmoi.wordpress.com/2010/02/17/et-un-challenge-un/