dimanche 14 avril 2013

Un dimanche au cinéma (1) - Le Beau Serge de Claude Chabrol


Après avoir visionné ces derniers temps plusieurs films de Chabrol, dont Poulet au vinaigre, j'ai décidé de commencer par le début, et grâce à ma médiathèque préférée, j'ai découvert cette petite perle en noir et blanc de 1959, premier film du réalisateur.
Considéré comme le prélude à la nouvelle vague, ce film nous raconte l'histoire de François, un jeune homme convalescent qui revient après dix ans d'absence dans le village creusois de son enfance. Dès son arrivée, il croise Serge, un ami d'enfance qui a visiblement sombré dans l'alcool après la perte d'un enfant. Ce dernier, mal marié avec Yvonne, tourne autour de Marie, sa belle-soeur, une belle petite garce à la blouse prompte à s'ouvrir. François, qui se refuse à accepter la situation en l'état malgré les avertissements des uns et des autres, va tout faire pour transformer son compagnon d'enfance....

Serge (Gérard Blain) et François (JC Brialy)
Je ne sais pas si on oserait, aujourd'hui, faire un film comme celui-ci ? Peut-être du côté des frères Dardenne ? Car il s'agit d'un vrai film social, qui ose montrer une réalité peu présente au cinéma, ou pas de cette manière là. La confrontation entre deux mondes, entre François, jeune urbain pétri de bonnes intentions mais loin des réalités du monde de son enfance et Serge, âme fêlée plus vivace qu'elle ne paraît, dégage une vraie force de questionnement. Chabrol ne juge pas, il semble simplement contempler les étincelles produites par le frottement de ces deux matières psychiques qui se heurtent mais n'arrivent plus à se comprendre, ou de manière fugace.
J'ai vraiment aimé cette puissance évocatoire finalement beaucoup plus morale qu'elle n'en a l'air. Elle est portée par la lumière dégagée par le noir et blanc. La dernière partie du film qui s'ouvre lorsque la neige tombe, en même temps que la nuit, est d'une beauté formelle réjouissante et ravissent un regard pourtant habitué à la surenchère des films à gros budgets. Comme quoi, l'argent ne remplace pas le talent...

Image qui lance la dernière partie du film
Elle est portée, cette puissance, par le jeu des acteurs, vraiment excellents. Mention spéciale à Bernadette Lafont, extraordinaire en délurée campagnarde armée d'une blouse et de charentaises qui vont en faire sombrer plus d'un. J'ai particulièrement goûté aussi le personnage du boulanger du village, joué d'ailleurs par le vrai boulanger de Sardent, le village creusois où fut tourné le film et ou Claude Chabrol séjourna quatre ans chez sa grand-mère, durant la Seconde Guerre mondiale.
Marie (B. Lafont), au centre
Enfin, la force du film tient sans doute au débat moral qui l'anime et qui est mis en scène, entre autres, au travers des dialogues avec le curé du village. J'ai d'ailleurs été surprise de trouver autant de références à la religion dans un film de Chabrol... mais j'ai appris depuis qu'il fut croyant et l'on sent ici qu'il connaît ses classiques, y compris du côté de l'Eglise. Cela donne au film un poids inattendu qui évoque parfois Bernanos (par ailleurs apprécié par le cinéaste).


Il ne me reste plus qu'une chose à faire... regarder Les cousins, deuxième film du cinéaste, où l'on retrouve le duo Gérard Blain et Jean-Claude Brialy... Peut-être à la semaine prochaine pour la suite alors ? En attendant, vous pouvez toujours aller voir la bande-annonce ICI, bon dimanche !

9 commentaires:

  1. ah oui! à dimanche prochain pour le deuxième, on compte dessus!
    ou alors faut pas nous mettre l'eau à la bouche ;-)

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    1. @Adrienne : je vais essayer de maintenir le rdv ;-) Bonne soirée à toi !

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  2. Avec mon fils, on se fait un film tous les mercredis après-midi. Je privilégie les vieilleries, vers lesquelles il n'irait pas de lui-même, histoire de lui ouvrir son horizon cinématographique (il a 14 ans et on fait ça depuis un peu plus de 2 ans). Mais je dois avouer que le cinéma français est le parent pauvre de ces séances... je me tourne plus volontiers vers le cinéma américain des années 40 à 60, je ne compte plus le nombre de westerns et de polars que nous avons vus...

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    1. @Yspaddaden : c'est vraiment une chouette idée je trouve ! Il y a pourtant de très bonnes choses dans le cinéma français... Tu devrais lui montrer la merveille de Jean Vigo "Zéro de conduite". Comme tout bon collégien qui se respecte, il va adorer la scène du chahut dans le dortoir, une perle de notre cinéma (je vénère cette scène). Bonne soirée :-)

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  3. Je n'ai jamais vu ce film. Faut que je remédie à cela, tu en parles bien.

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    1. @Nadaël : ce fut vraiment une agréable surprise pour moi ce film ! C'est bien les médiathèques, on déniche des perles rares ;-)

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  4. Ce film ne me tente pas du tout mais après avoir lu ton billet, je regarderai peut-être !

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    1. @Maggie : ce film est resté un moment devant mon lecteur de dvd mais vraiment, ce fut une excellente surprise ! En plus, comme toute 1ère oeuvre, c'est le film matrice... donc, cela peut être intéressant de le voir pour mieux connaître Chabrol.

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    2. @Maggie : PS : de plus, il y a un excellent documentaire agréable à regarder sur la Nouvelle Vague dans les bonus !

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